Contents
- Déclaration des droits de l'homme et de la femme
- L'amour de rencontre
- Vivre en couple
- Les divorces sans fin
- Ré-inventer la vie en couple…
- Vivre en couple ou comment vivre à deux en étant différents
- Association, solidarité, mise en dépendance ou rivalité dans un couple ?
- De quoi est fait un couple heureux ?
- Les couples malheureux et qui font tout pour le rester !
- Les petits problèmes
- Les violences en amour
- Les chagrins d’amour
- Se sacrifier pour l’autre ?
- Se séparer
- Vivre les séparations sans se détruire
Déclaration des droits de l'homme et de la femme
Par Jacques Salomé
Te rencontrer sans te réduire,
Te désirer sans te posséder,
T’aimer sans t’envahir,
Te dire sans me trahir,
Te garder sans te dévorer,
T’agrandir sans te perdre,
T’accompagner sans te guider,
Et être ainsi moi-même
Au plus secret de toi.
L’amour de rencontre est une parenthèse, ouverte sur des pointillés, des incertitudes, des étonnements plus étonnés que des rêves.
L’amour de rencontre a un avant prometteur et un après enchanteur.
Dans des filigranes de tendresse, sur trame de rencontres et de temps effleurés l’amour de rencontre ne s’étiole pas.
Sur un fond d’espérance étiré dans la durée infinie d’un instant, sans regret pour les solitudes désespérées d’autrefois, alangui dans les possibles du plaisir partagé, l’amour se rencontre et s’amplifie.
L’amour de rencontre exhale son essence, parfum de surprise ébahie, odeurs de corps emmêlés, fragrances de joies scintillantes, sur caresses d’or.
L’amour de rencontre relègue parfois au loin les besoins et les exigences d’une vie partagée pour se révéler joyeux, cerise sur le gâteau de la vie. Il peut devenir aussi une perle rare aux reflets irisés des désirs.
Dans l’intense des moments traversés de bohèmes, hasards rêvés et accueillis, la rencontre de deux amours reste une flamme.
L’amour de rencontre, cet élan entre un et une… qui se croisent à jamais.
- c’est apprendre à vivre des sentiments multiples et parfois antagonistes.
« Je peux aussi t’aimer et te détester ou me blesser sans cesse à la relation que tu me proposes et que, cependant, j’accepte ».
« Je peux me sentir aimé et éprouver le sentiment que mon amour à moi, n’est pas reçu… par toi ».
« Je peux découvrir avec regret que ce n’est pas avec toi que je pourrai combler mon besoin d’échange et de partage »
Nous le savons un peu mieux aujourd’hui, ce dont souffrent le plus les enfants lors de la séparation de leurs parents, c’est de sentir que cette rupture n’atténue pas la violence ou l’intensité du conflit qui les opposent. Que ce conflit soit larvé, non exprimé, qu’il se manifeste dans l’intimité du couple ou au contraire qu’il soit extériorisé, porté sur la place publique, exploité devant les enfants, ceux-ci imaginent souvent qu’ils sont à l’origine du divorce et veulent prendre sur eux une partie de la responsabilité des attaques et des accusations entendues. Ils peuvent aussi s’identifier à l’un et vouloir réparer la souffrance perçue. « Ne t’inquiète pas maman je suis là, moi je ne te quitterais jamais», pourra dire un petit garçon. « Moi je t’aime papa, tu ne seras pas malheureux avec moi », complétera une petite fille.
Plus de la moitié des divorces qui sont censés consacrer la rupture du lien conjugal vont mettre en danger et blesser aussi le lien parental qui se trouve trop souvent maltraité par l’un ou l’autre des ex-conjoints. Lors d’un divorce, il devrait être rappelé que le lien parental doit continuer à être alimenté par chacun des parents. Dans beaucoup de cas, il sera le terrain d’une guerre féroce qui peut durer des années. C’est ainsi que de nombreuses séparations vont s’enkyster durant des années autour de deux écueils importants.
Celui des enfants qui vont servir d’enjeux autour des accusations, des ressentiments, des contentieux qui continuent à s’exprimer entre le père et la mère.
L’autre écueil sera celui de la non-liquidation effective de la communauté de biens. Car même s’il est mentionné dans le jugement de divorce comment doit s’effectuer le partage et la répartition du patrimoine acquis en commun, dans beaucoup de cas, le jugement n’étant pas immédiatement exécutoire, l’un des partenaires, l’homme le plus souvent, retarde, fait obstruction, ne donne pas suite, et s’oppose par tous les moyens, farouchement à restituer la part qui est due à son conjoint.
Celui-ci hésite souvent à intenter un procès pour simplement que soient appliquées et respectées les conditions minima de l’ordonnance de divorce. Il y a, me semble-t-il, une carence à la fois du droit et de la justice, en laissant en place les éléments d’un conflit possible, qui va perturber gravement les relations parentales entre parents divorcés. Insatisfaction, frustration, sentiment d’impuissance, vont habiter celui des partenaires qui voit ses droits les plus élémentaires bafoués, les décisions reportées aux calendes. Ce type de conflit est parfois profondément enraciné dans l’esprit de celui, le mari le plus souvent, qui a le sentiments qu’il doit “lâcher” un bien qui lui appartient en propre, qu’il a payé avec son salaire, qu’il estime avoir acquis par son travail, en oubliant toute l’organisation, la présence, les soins prodigués par sa femme, durant des années pour qu’il puisse justement partir au travail et gagner ce qu’il a gagné dans de bonnes conditions matérielles et psychologiques.
Les “problèmes” d’argent, via la pension alimentaire, la liquidation de la communauté, ou l’appropriation par l’un des biens communs, retentissent lourdement sur le comportement des enfants, qui s’identifient alors à l’un ou à l’autre des parents. Soit à celui qui apparaît comme la victime spoliée, soit à celui qui se présentera comme une victime harcelée, en prenant sa défense et en renforçant l’accusation exprimée par celui qu’ils veulent protéger.
Le législateur devrait poser les bases d’une loi, d’une procédure qui ne favorise pas une hémorragie procédurière dans laquelle peuvent s’enfermer de nombreux couples divorcés.
Peut -être aussi faut-il être plus clair au départ sur les engagements qui seront pris par chacun des conjoints envers l’autre et se rappeler qu’il faut éviter de confondre le lien conjugal avec le lien parental.
Le couple d'autrefois, (un autrefois pas si lointain), même s'il n'est pas totalement périmé ne peut plus servir de modèle aux aspirations des femmes et des hommes d'aujourd'hui. Celles-ci et ceux-là ne veulent plus s'engager sur des bases qui leur semblent trop fragiles ou trop périlleuses. Le modèle implicite de vie en couple, qui était proposé à ceux de ma génération (1935) reposait à la fois sur un contrat social (le plus souvent validé par un engagement religieux) et sur un contrat intime.
Contrat social dans lequel on mettait en commun des ressources, on partageait des biens, on cohabitait sur un même territoire, on liait l'essentiel de ses engagements à l'autre (attachement voulu ou subi) et on s'assurait d'une descendance. Engagement religieux qui garantissait la solidité du lien et de la fidélité en réciprocité même si ce dernier point était parfois transgressé.
Contrat intime à données variables dans lequel on offrait à l'autre l'intimité de son corps, on désirait (pas toujours) partager du plaisir, des affinités ou des complémentarités, pour permettre à chacun d'éprouver un contentement de soi, en imaginant que l'évolution de chacun se ferait en parallèle et au même rythme et que la vie commune durerait le plus longtemps possible.
La pression sociale, religieuse ou matérielle assurant une force de cohésion capable de résister (dans la plupart des cas) aux forces d'éclatement et d'individuation, de chacun des protagonistes toujours à l'œuvre dans un couple.
Les partenaires du couple d'aujourd'hui semblent ajouter une mission complémentaire, celle de se rendre mutuellement heureux, d'être en quelque sorte responsable du bonheur de l'autre et de donner une consistance et une durée à leur amour.
Cette mission implicite pouvant être ressenti comme étant à la source de la cohésion interne (la pression externe s'étant considérablement relâchée) nécessaire pour maintenir deux êtres ensemble, capable de lutter contre les forces de dispersion, d'individuation de chacun des partenaires. Ce n'est plus le couple qui protège et rassure, mais l'amour, la compréhension, l'attention que chacun doit se donner, que chacun attend de l'autre.
Ainsi les exigences relationnelles (mettre en commun, dialoguer, échanger, partager, se confronter avec ses différences et des désirs parfois concurrents) semblent être au premier plan des attentes de l'un et de l'autre.
La satisfaction des besoins relationnels (pouvoir se dire, être entendu, reconnu, valorisé, disposer d'une intimité et d'un pouvoir d'influence en réciprocité) prend aujourd'hui une grande place dans les attentes de chacun, mais surtout des femmes qui voient dans les bienfaits d'une bonne relation une sorte de garantie pour la survie du couple. La cohabitation harmonieuse d'une double intimité (intimité commune/partagée et intimité personnelle/réservée), la recherche d'une bonne distance, d'une sécurité affective et matérielle suffisantes pour affronter les contraintes liées aux multiples rôles que chacun est appelé à vivre (maman/mère, personnel/professionnel, mari/femme, filial et co-filial, avec les beaux-parents, avec les enfants, les “ex” et les belles-familles des couples recomposés...) semblent être parmi les préoccupations dominantes dans les nouveaux couples. Certains vont se donner en plus la mission de réussir là où ils ont vu leurs propres parents échouer.
Maintenir vivante, la relation du couple, va se révéler ainsi pour certains un véritable travail au quotidien.
Toute rencontre amoureuse, outre la part d’imprévisible et de mystère qui s’y attache, est fondée sur l’attirance (à sens unique ou réciproque), sur l’existence de sentiments (à sens unique ou partagés) sur des projections réciproques qui auront par la suite à se confronter avec la personne réelle.
Une relation de couple, conjugale ou non, va s’articuler, autour de quatre composantes personnelles :
- Être délié pour pouvoir s’allier,
- Être suffisamment autonome affectivement et matériellement pour pouvoir s’engager,
- Être capable de proposer un projet de vie en commun inscrit dans un avenir à construire à deux.
- À cela s’ajoute une capacité (présente ou à développer) de se proposer mutuellement des communications et des échanges de qualité qui seront à mettre en œuvre au quotidien, pour alimenter, vivifier une relation de respect mutuel.
Ainsi chacun des partenaires d’un couple aura à dépasser et à démystifier les images écrans qui ont présidé à la rencontre et à se dégager, trouver la bonne distance avec les relations significatives passées (familiales, autres amours, engagements antérieurs…)
Chacun des partenaires aura à apprendre à vivre à l’intérieur d’une relation proche constituée par une double intimité :
- intimité commune et partagée,
- et intimité personnelle et réservée.
Ils auront à se donner les moyens de vivre des confrontations au quotidien (et non des affrontements), à se soutenir (et non à se nier, se disqualifier ou se dévaloriser), à s’amplifier et non à se concurrencer ou à se combattre comme il arrive parfois.
Toute relation de couple se traduira en un plus de vivance et de bien être si chacun des partenaires est conscient d’un devoir de clarification et d’évolution autour de différents enjeux, dont je résume l’essentiel.
Développer une capacité d’autonomie affective.
Pour s’allier avec l’autre, il vaut mieux avoir déjà fait alliance avec soi-même. La connaissance de soi entraîne une responsabilisation plus grande envers ses propres sentiments et ressentis intimes. « Je suis responsable de ce que j’éprouve, je n’ai pas à rendre l’autre responsable de ce qui m’habite et me traverse. »
Apprendre à se respecter et à respecter l’autre dans ses différences, cela veut dire “ne plus se laisser définir par l’autre”. Ce n’est ni le compromis, ni la soumission, ni les concessions qui maintiennent deux êtres ensemble, mais l’affirmation et la reconnaissance des différences.
Il y a aussi le risque de développer des relations dominant/dominé, qui prennent dans le couple des formes subtiles (ou violentes) et qui doivent faire l’objet d’une grande vigilance.
Se donner les moyens de communiquer, c’est-à-dire à mettre en commun.
Et pour cela apprendre à mieux définir ses attentes, ses apports et ses zones d’intolérance… et à les confronter aux attentes, apports et zones d’intolérance de l’autre.
Sortir de l’implicite et dépasser certaines croyances erronées comme : « si l’autre m’aime, il devrait savoir ce que je pense sans avoir à le dire…, il devrait entendre mes demandes sans que je les exprime… »
Accepter l’évolution et le changement, ce qui veut dire aussi des engagements à réactualiser. Le propre du vivant sur la planète terre est qu’il évolue, grandit ou se transforme. Une relation vivante est soumise à cette loi d’évolution. Des mises au point, des partages, des réajustements seront indispensables et devront faire l’objet non seulement d’une mise en mots, mais d’une confrontation, pour permettre à l’autre de nous voir (et de nous accepter) là où nous sommes, et non là, où il nous voudrait.
À savoir : la dynamique de la semblance, celle de l’antagonisme, de la complémentarité, celle encore du parasitisme, et celle du miroir, ou relation pseudo-thérapeutique.
Dans chacun de ces systèmes, tout se passe comme si chacun des partenaires confortait son bien être, trouvait son compte, pouvait tirer un bénéfice, conscient ou inconscient à la présence, à l’apport, à l’affrontement ou à la soumission de l’autre. Car nous commençons de mieux en mieux à le comprendre, au-delà d’une attirance, de sentiments, qui peuvent être très forts, un couple se lie, s’attache, peut même s’exploiter mutuellement, pour mille enjeux secrets qui vont parfois se révéler de plus en plus prégnants et contraignants (pour l’un au moins) au cours des ans.
Dans la dynamique de la semblance, il y a au travers de goûts, de centres d’intérêts ou de points de vue très proches, identiques, une stimulation, une émulation, un béquillage réciproque qui sécurise, conforte, renforce à la fois les possibles de chacun et l’image du couple, qui se présente comme homogène, solide, fiable. Tant que chacun trouve son compte à cette fusion…, le couple est solide. Quand un des deux découvre que ce qui lui paraissait identique, est en fait très différent, le couple se fragilise… : « Nous pensions aimer Mozart l’un et l’autre, et j’ai mis douze ans à découvrir que nous n’aimions pas le même Mozart, moi j’adorais celui des concertos pour piano, et elle prisait fort celui des opéras ! »
Dans la dynamique antagoniste, l’affirmation, la confrontation et même l’affrontement sur des différences constituent un challenge stimulant pour l’un et l’autre, permettant le plus souvent à chacun de donner le meilleur de lui, de devenir très créatif. L’affirmation, la prise de position de l’un renforçant, dynamisant le positionnement de l’autre, qui en devient plus créatif et réciproquement. Ces couples peuvent durer très longtemps : « J’ai beaucoup grandi avec cet homme, il me stimulait, me réveillait, m’agrandissait, et puis un jour, j’ai senti qu’il se répétait, que nous tournions en rond, que nous nous freinions, que nous nous appauvrissions mutuellement, et j’avais le sentiment qu’il en était de même pour lui… ».
Dans la dynamique complémentaire, chaque partenaire apporte ou puise dans l’autre ce qu’il n’a pas. Ce qui donne à chacun le sentiment qu’il est important, voire extraordinaire, indispensable pour l’autre. Mais, il arrive parfois, que l’un grandisse ou s’autonomise plus vite que l’autre et alors le couple devient plus vulnérable… : « Grâce à elle j’ai beaucoup grandi, pris de l’assurance, j’ai fait des choses que sans elle je n’aurais jamais entrepris, ce qui paradoxalement m’a permis un jour de pouvoir la quitter… ».
Dans la dynamique du parasitisme, l’un met l’autre (qui l’accepte le plus souvent, dans un premier temps avec reconnaissance), au service de ses besoins. Les couples, dans lesquels il y a un créateur (écrivain, sculpteur, peintre, musicien…), ou une passion pour une activité (voile, montagne, parachute…), fonctionnent fréquemment sur ce modèle. L’un se consacrant entièrement (et en tirant un bénéfice narcissique certain) au service des besoins de l’autre. Ces couples sont en général très solides, car le parasite s’arrange pour ne pas désespérer ou trop maltraiter ni détruire…, celui dont il dépend… : « Je voulais qu’il réussisse avec son art, j’ai fait passer son œuvre avant mes propres désirs, il ne voulait pas d’enfant, j’ai tout accepté pour mieux le soutenir… ».
Dans la dynamique du miroir, ou pseudo thérapeutique, l’un voit chez l’autre quelque chose à traiter, à soigner, à changer, qu’il ne peut faire changer… chez lui-même. Beaucoup de couples, où l’un des partenaires, est alcoolique, dépressif, violent se construisent sur ce modèle. « J’ai mis des années à découvrir qu’en voulant soigner l’alcoolisme de mon mari, je tentais désespérément de traiter une dépendance équivalente à un alcoolisme, plus subtil chez moi, celui de me dévouer, de faire pour l’autre, pour ne pas penser à moi… »
Toutes ces dynamiques bien sûr se développent avec de nombreuses variantes, car notre adaptabilité est redoutable et pas nécessairement préjudiciable à l’autre, mais le plus souvent à nous-mêmes dans la durée.
J’ai tenté de repérer les ancrages et les constances qui existent chez les couples heureux et qui donnent une solidité, une fiabilité, une cohérence et une qualité de bien être durable à la vie de ces couples. En les énonçant, je ne propose pas une recette miracle mais je pose quelques balises qui peuvent être utiles à tous ceux et celles qui voudraient s’engager sur cette voie.
La capacité (chez chacun) à être un bon compagnon pour soi-même. Autrement dit, être une personne douée d’une autonomie affective et matérielle suffisante pour ne pas faire dépendre la satisfaction de ses besoins de l’autre. Avoir une sécurité intérieure élevée, qui évitera de déposer ses peurs et ses angoisses sur l’autre ou de le rendre responsable de son bien être (ou mal être). C’est en étant heureux avec soi même que l’on peut proposer à l’autre de partager et d’agrandir ensemble cette part de bonheur
Des attitudes et aptitudes relationnelles qui permettront de traverser les trois grandes périodes de la vie d’un couple : de passer de la fusion (1+1=1) à la différenciation (1+1=1+1) pour accéder à la confrontation (1+1 relation +1= 3). Et cela quelque soit le système relationnel qui s’est établi au départ : celui de la semblance : « on aime les mêmes choses, on se sent d’accord pour les mêmes projets», celui de la complémentarité : « tu as ce que je n’ai pas, je possède ce qui te manque » ou encore de l’antagonisme : « nous ne sommes d’accord sur rien, mais c’est cela justement qui nous dynamise et nous permet de nous stimuler mutuellement sans chercher à nous convaincre et à imposer à l’autre la vérité ou le bien fondé de notre position ».
- Un accord physique qui fait que le corps de l’autre est à la fois attirant et stimulant des émois de chacun. Cela suppose une appétence potentielle qui trouve des réponses dans la disponibilité et le désir de l’un et de l’autre.
- Un accord social fondé, pour chacun, sur une sensibilité ouverte à l’histoire et l’éducation de l’autre, à ses valeurs et croyances, à ses engagements et fidélités.
- Un accord psychologique qui suppose des différences dans les traits de caractère mais la possibilité d’un accord profond au niveau de la personnalité qui permettra de diminuer les antagonismes potentiels présents chez chacun.
- Un bon équilibre entre forces de cohésion (désir et plaisir à être ensemble) et les forces de distanciation (désir et plaisir à trouver la bonne distance, y compris le besoin de pouvoir se séparer sans se perdre).
- Un accord émotionnel suffisamment stable pour absorber les variations émotionnelles ou les écarts et les emportements émotionnels qui peuvent surgir en période de stress ou de difficultés.
- Une sensibilité spirituelle qui ne se laisse pas enfermer par des dogmes rigides ou un intégrisme religieux qui tenterait d’enfermer l’un des partenaires dans les croyances ou les certitudes de l’autre.
- Une grande fluidité et beaucoup de souplesse dans les rôles respectifs qu’ils auront à tenir dans leur vie sociale proche (famille d’origine, amis) et leur vie sociale plus large (monde du travail, loisirs, engagements sociaux et civiques…)
Je ne sais si tous les couples heureux peuvent réunir tous ces ingrédients relationnels, mais il me semble que s’ils peuvent s’en approcher, ils se donnent plus de moyens pour s’épanouir ensemble.
Les ingrédients de bases sont les suivants et ils peuvent être mis à contribution avec beaucoup d’application et de ténacité, par chacun des protagonistes mais sur des modes différents.
La critique ironique et la banalisation
A peine l’un tente-t-il de s’exprimer sur un sujet personnel ou commence-il à mettre en cause l’autre que des sarcasmes, de l’ironie ou une récupération par la banalisation : « mais nous sommes comme les autres, les autres aussi ont des problèmes pour se comprendre, ils font avec sans se casser la tête à vouloir chercher la petite bête… » Ce qui entraîne une contre offensive, dans laquelle l’autre retourne l’accusation et tente de mettre l’autre sur le même plan.
Exprimer son ressenti face à un comportement, n’a pas le même effet que de faire un reproche, une critique sur la personne, en pratiquant la relation klaxon à base de tu : « tu ne fais jamais ce que tu dis, tu ne me respecte pas en arrivant en retard sans me prévenir, tu ne changeras jamais, c’est toujours les autres qui passent en premier pour toi, tu ne penses qu’à ton petit confort, tu es vraiment un parfait égoïste… »
Le mépris
Quand l’un des partenaires ne peut plus, non seulement admirer sa compagne ou son compagnon, mais qu’il l’accable de sarcasmes, de disqualifications explicites : « mais regardes donc comment tu t’habille, comment tu es grosse, comment tu es incapable de remplacer une simple étagère dans la cuisine, comment tu oublie tout, comment tu ne te respecte pas avec ton patron… » ou encore de jugements de valeur implicites par des mimiques, des ricanements, moues dédaigneuses.
Le mépris vise à humilier, à rabaisser l’autre, de préférence devant les autres. Mais le mépris engendre le mépris, car celui qui est ainsi méprisé se demande à un moment donné : « si l’autre n’est pas encore plus bête que lui, de continuer à vivre avec, de poursuivre une relation qui lui paraît si nulle, si débile… »
L’attitude défensive
Devant les reproches, les attaques, les critiques ou les mises en cause de l’autre, celui qui se défend, se justifie, qui veut faire la preuve que c’est l’autre qui a tort, ne sait pas qu’il entretient ainsi le conflit. En voulant montrer que son partenaire se trompe, en voulant marquer des points, il relance les accusations qui deviendront de plus en extrêmes.
La dérobade
L’un des partenaires, souvent l’homme, s’enferme dans le silence. Il fuit dans l’action, quitte la cuisine ou l’appartement, quand l’autre tente de le mettre en cause, de lui dire : « je voudrais que nous parlions » ce qui signifie le plus souvent : « j’ai des choses à te dire qui ne vont pas te faire plaisir ! ». Parfois il l’énonce clairement : « parle toujours, ça entre par une oreille, ça ressort par l’autre » ou encore : « de toute façon je sais ce que tu vas encore me dire, tu n’es jamais contente, tu ne sais pas changer de disque, tu sais bien que ça ne sert à rien de parler, on va s’énerver inutilement… ».
Ce qui blesse encore plus celui qui voudrait non seulement parler mais être entendu, qui voudrait aussi que l’autre dise ce qu’il ressent, éprouve, pense sur tel ou tel problème.
La mise en œuvre de ces quatre comportements, maintient un état d’insatisfaction mutuelle, de tensions qui ne s’évacuent pas, de conflits endémiques qui vont collaborer au mal être, au malaise de chacun. C’est la façon dont un couple se dispute et non la fréquence des disputes, c’est la façon dont les scénarios se répètent, s’imbriquent l’un dans l’autre qui permet de prédire une évolution douloureuse et souffrante.
(*) Yvon Dallaire. “Qui sont ces couples heureux ?” (Ed. Option Santé)
« Je vous appelle, mais peut être que ce n’est pas nécessaire. Je veux juste vous parler de quelque chose qui me préoccupe, mais vous allez certainement penser que je peux m’en sortir tout seul… »
Si le thérapeute demande des précisions ou invite à en dire un peu plus avant de fixer un rendez vous, l’interlocuteur élude, se dérobe encore un peu « Ce n’est pas très grave, c’est juste que cela m’ennuie, mais ce n’est pas facile d’en parler comme cela, je préfère en parler avec vous, justes quelques minutes, vous comprendrez mieux… ». « Je vous appelle, mais si vous pensez que je me trompe dites le moi, je peux attendre… »
Le petit problème en question, neuf fois sur dix, concerne la vie sexuelle et en priorité le fonctionnement (ou le dysfonctionnement) de cet appareil (de cet outil dirons certains) qui reste au centre de beaucoup de préoccupation chez les hommes. « Je ne comprends pas, quand j’étais avec ma femme, je n’avais aucun problème, cela marchait à tous les coups, mais avec l’amie que j’ai rencontrée après mon divorce, ça coince. Je n’arrive pas à avoir une érection. Pourtant elle est gentille et patiente, mais je n’arrive plus à bander comme avant. J’ai pourtant vraiment envie de faire l’amour avec elle, surtout quand je ne suis pas avec elle j’y pense sans arrêt, mais sitôt en situation, je suis mort, mon désir ne se réveille pas. J’en ai la volonté mais pas le désir, rien ne vient… »
Les petits problèmes des hommes se localisent autour de l’érection, de l’éjaculation, de la difficulté à obtenir le plaisir ou à répéter la performance ou encore du peu d’appétence… Un tel dira « Je ne me reconnais plus j’étais une véritable mitrailleuse, plusieurs fois chaque nuit et maintenant c’est comme si j’avais un minable fusil à un coup ! »
« Au début ça va, j’arrive à entrer mais ensuite je deviens tout mou, je me perds… »
Parfois surgissent des interrogations qui n’avaient pas eu de place en eux jusqu’à ce jour. « Ma nouvelle compagne veut que je lui embrasse le sexe, moi je n’ai jamais fait ça. Je n’aime pas, ça me dégoûte. Je sens que je lui fais de la peine. Elle, elle n’a aucune difficulté avec mon sexe, elle me caresse, m’embrasse, me boit sans difficulté. Je ne sais plus où j’en suis. J’ai l’impression d’être de la vieille école, face à une femme dont la liberté m’éblouit, mais me fout la trouille ! »
Il y aurait donc une école nouvelle à créer, qui apprendrait aux hommes les nouveaux comportements amoureux des femmes, les pratiques inédites ou inhabituelles ? Ou simplement la fantaisie, la liberté d’être.
Il semble qu’il y ait chez les femmes d’aujourd’hui, non seulement une plus grande liberté mais aussi une inventivité, une créativité qui bousculent les habitudes, le train-train sexuel de certains hommes et les confrontent à des résistances, en eux, inattendues.
« Je ne savais pas qu’une femme pouvait s’abandonner avec autant de liberté. Elle me parle de tout sans gêne, de mon sexe, du sien, de ce qu’elle préfère, elle me demande ce que j’aime, au début je n’osais pas, j’avais un peu honte et la peur surtout d’être vu comme égoïste c’est ce que disait toujours ma femme quand nous étions mariés… »
Les petits problèmes chez les hommes, touchent non seulement à quelques uns des mystères de leur propre sexe mais aussi à ceux encore plus mystérieux et secrets de la femme, qui reste pour beaucoup un immense continent à découvrir. Ainsi se clarifient, quand ils peuvent en parler, non pas uniquement des connaissances confuses mais vont aussi se restaurer quelques situations conflictuelles enfouies dans leur histoire. « La première fois où j’ai senti cette femme couler, j’ai crû qu’elle était incontinente et vous me dites que c’est normal, que c’est un cadeau, une marque d’abandon et de confiance ! Je n’avais jamais vu ça. J’avais associé à ce que j’avais entendu dans la cour de récréation de mes dix ans- il paraît que les hommes pissent dans les femmes !»
Ainsi les petits problèmes quand ils sont mis à plats, quand ils peuvent faire l’objet d’une mise en mot, d’une médiation, d’un accompagnement respectueux peuvent ouvrir à une meilleure compréhension de soi et de l’autre et à plus d’intimité partagée entre hommes et femmes. Ils peuvent surtout ne pas rester enfermés dans le silence, dans la rumination ou dans la peur.
L’amour entre deux êtres est constitué par un ensemble de sentiments très divers, complexes et parfois contradictoires. Sentiments venant de l’un et allant vers l’autre et (quelquefois) réciproquement, mais qui parfois, paradoxalement, ne se combinent pas toujours bien ensemble.
« Je t’aime tel que je te voudrais que tu sois et non tel que tu es ! » pourrait dire l’un, « Je voudrais être aimée pour ce que je ne suis pas, c’est pour cela que je t’en veux de m’aimer pour ce que tu crois que je suis ! » pourrait dire une autre.
« Je voudrais être aimé autrement que ce que tu m’aimes, avec un peu plus de ceci, un peu moins de cela et encore plus de ça… » « Ah j’aimerais pouvoir t’aimer comme tu le demandes, mais je ne sais pas comment ! » « Si tu m’aimais vraiment tu me ferais cet enfant que je te demande depuis cinq ans, mais ton refus me montre que tu m’aimes d’accord, mais pas vraiment, pas suffisamment ! »
Les reproches exprimés ou cachés sont monnaie courante en amour, comme si le fait d’aimer donnait le droit de réclamer, d’imposer ou d’exiger.
Tout cela, je crois que chacun le sait s’il a déjà aimé ou s’il a été aimé. Au fond ce que nous recherchons tous, avec le plus de ferveur, c’est de pouvoir aimer pleinement, sans contrainte, sans regret, sans amertume celui ou celle qui nous aime. De pouvoir aimer l’autre comme nous le ressentons, sans limites, sans interdits, sans conditions. Un autre qui réclame lui/elle aussi la même chose ! Mais comme ce ne sont pas les mêmes limites, les mêmes interdits, les mêmes conditions alors parfois cela se gâte, dérape et débouche sur des conflits ouverts ou larvés.
Les violences en amour, qui sont souvent liées à des attentes déçues, se déposent alors avec un aveuglement inouï sur les personnes que nous aimons, qui nous sont chères au cœur, mais à qui nous attribuons le plus grand des défauts, celui d’être « insatisfaisantes, insuffisantes, frustrantes ».
La violence peut surgir aussi quand nous sentons notre propre amour menacé, mis en danger ou maltraité par celui que nous aimons, nous sommes capables de devenir méchant, injuste, dangereux. « Je ne supporte pas la façon dont tu reçois ce que je tente de te donner. J’ai le sentiment que tout ce qui vient de moi n’est pas bon pour toi… »
« Je ne comprends pas que tu n’accueilles pas mon désir, moi j’ai envie de faire l’amour avec toi, c’est normal puisque je t’aime, et toi tu me dis que tu n’as pas envie, que je demande trop souvent, que je vais trop vite, que je ne sais pas m’y prendre, que tu voudrais plus de tendresse, mais bon sang, comment veux-tu que je te donne de la tendresse tu me frustre sans arrêt ! Tu vois quand je t’entends me dire “je t’aime” et que tu me refuses, moi j’ai envie de te taper dessus ! »
La plupart du temps, ce partenaire là n’a pas besoin de le dire, il va le faire. Les viols conjugaux sont très nombreux, je voudrais rappeler qu’on appelle viol conjugal, toute relation sexuelle imposée par la force ou la pression morale et psychologique sur une partenaire non consentante.
Les violences en amour sont parfois plus subtiles, d’ordre moral, quand on culpabilise l’autre de ne pas être d’accord avec nous, d’avoir un point de vue différent, quand nous imposons des choix de vie, dictons des comportements, une façon de s’habiller, d’élever les enfants, de se tenir en public.
Quand on s’abrite derrière la tradition sans tenir compte de la personne réelle qui est devant nous avec ses ressources, ses besoins et ses aspirations propres.
Les violences les plus terribles peuvent surgir quand celui qui ne se sent plus aimé, va tenter de reconquérir, de contraindre l’autre à l’aimer quand même, à rester dans la relation, à partager le même lit (s’ils sont en couple) à poursuivre une vie conjugale (alors que l’autre demande la séparation)… Le besoin d’exercer un contrôle sur celui qui nous échappe, qui veut “reprendre sa liberté” (quelle expression pathétique: reprendre sa liberté, cela veut donc dire qu’on l’avait donnée et peut être perdue !) devient quelquefois obsessionnel, peut déboucher sur un harcèlement oppressant.
Celui qui aime, s’en défend, trouve le plus souvent cela normal, d’imposer ses choix, son point de vue, ses attentes et ses désirs : « c’est que je l’aime moi, alors je ne comprends pas pourquoi elle ne m’aime plus ! » Cela veut dire que ce partenaire (homme ou femme) n’a pas compris que les sentiments ne se commandent pas. Qu’il faut être humble devant l’amour. On ne peut se dicter d’aimer ou de ne plus aimer, pas plus qu’on ne peut influencer les sentiments de l’autre. On peut tout au plus les respecter, les alimenter par vivre une relation de qualité, les nourrir de rêves et de projets et surtout apprendre à vivre l’instant. Nous devons apprendre à vivre l’amour au présent, avec seulement l’espoir de l’inscrire dans la durée, car nul ne sait à l’avance la durée de vie d’un amour.
Ils surgissent sans prévenir, car ils sont au cœur même de l’amour. Ils envahissent soudain tout l’espace de notre cœur et quelquefois, de tout notre être quand nous abordons “cet étrange moment où l’amour se mue en souffrance”.
Bien sûr, il y a les petits et les grands chagrins d’amour. Les petits sont semblables à des courants d’air qui vont aérer la relation et, parfois, la dynamiser, ils sont la pluie ou les nuages qui cachent le soleil, puis vont s’évaporer dans un échange, un geste ou un regard plus tendre !
Les chagrins d’amour au quotidien, petits cailloux blancs sur le fil étroit d’une rencontre amoureuse. Ils sont capables, quand ils ne sont pas dévastateurs, de nourrir, de stimuler, de maintenir vivace un amour.
Mais il y a aussi des chagrins plus incisifs, qui éclatent quand la réalité de l’un blesse l’imaginaire de l’autre. L’amour est semblable à une maladie d’incomplétude, qui nous oblige d’une certaine façon à prendre conscience de nos imperfections, de nos manques et de ceux de l’autre !
Souvent nous inventons notre amour bien avant de le rencontrer ou de le fixer sur une personne. Et la relation, si elle s’établit, va confronter nos sentiments à ceux de l’autre, nos attentes à celles de l’aimé(e).
Les chagrins de l’amour ont beaucoup de visages et surtout de multiples langages pour se dire ou se taire.
Mais le chagrin le plus violent, le plus terrible, est la désertion de l’amour, quand arrive le désamour. L’amour était là, ensoleillé, et un matin, il n’est plus là, le gris et le froid nous habitent. Quand l’aimé(e) tout proche s’absente, quand il (elle) est ailleurs, déjà loin de vous. Quand il (elle) ne donne plus de vie aux signes de vie, alors un pincement au cœur, un fil invisible vous serre à la gorge, vous rappelle la fragilité de l’amour ou l’inconstance possible d’un sentiment…
La veille encore, on riait ensemble, nos mains se cherchaient et aujourd’hui ressemblait à toujours. L’amour était là, fort, inconditionnel, présent, disponible, lumineux et sans retenue aucune. Et quelques instants plus tard, dans un aujourd’hui catastrophe, dans un tremblement de vie, il (elle) nous dit : « C’est fini, je ne t’aime plus mon amour, je pars, je te quitte ».
Nous avons la possibilité de nous transformer en victime, blessée à mort, en accusateur, en juge, s’appuyant sur la sincérité de nos sentiments, sur notre propre fidélité, sur « après tout ce que j’ai fait pour toi… »
Rappeler les engagements pris ne nous aide pas et cela risque de nous enfermer dans des ressentiments et des rancœurs durables.
Nous pouvons, parfois, avec une grandeur d’âme remarquable, au-delà de notre incrédulité ou de notre incompréhension, témoigner d’une écoute et même proposer notre assistance, pour que celui (celle) qui nous quitte puisse le faire sans se sentir coupable, sans s’en vouloir mais le chagrin, quelques instants plus tard, nous rattrapera, nous meurtrira le cœur et le ventre et nous éloignera d’un imaginaire trop idéalisé !
Nous pouvons aussi tel un animal blessé, fuir, nous éloigner et nous perdre en solitude.
Mais nous pouvons aussi nous responsabiliser et tout en respectant nos propres sentiments, toujours vivants, même si ceux de l’autre se sont détournés de nous, entrer dans le renoncement d’une relation, qui nous paraissait si vitale pour la transformer en souvenir vivifiant jusqu’aux soirs des oublis.
Chacun sait combien il est important, dans un couple, de pouvoir compter, de s’appuyer sur l’autre dans les moments difficiles ou les passages périlleux de l’existence. Mais il n’est pas toujours nécessaire que l’un se sacrifie, surtout quand c’est toujours au profit du même ! Les relations de béquillage, ou d’assistanat en continu, sont souvent aussi douloureuses pour l’un que pour l’autre des partenaires. Prendre conscience que nous avons proposé à l’autre, à celui ou à celle qu’on aime, qui est le père ou la mère de nos enfants, des relations asymétriques (qui peuvent se révéler plus ou moins aliénantes au long des années), peut déclencher une prise de conscience vertigineuse et déboucher sur une remise en cause courageuse.
Certains échanges et partages où s’exprimeront les attentes, les apports et les zones d’intolérance de l’un et de l’autre, peuvent contribuer à libérer beaucoup de non-dits, à dissoudre des ressentiments, éliminer ruminations et rancœurs, bref, alléger et assainir une relation dysharmonique ou trop déséquilibrée.
Mais la prise de conscience n’est pas suffisante, il faut quelque chose de plus, un changement dans la relation que l’on propose à ceux qui nous sont proches et sur lesquels, trop souvent, vont se déverser des attentes ou des reproches, des accusations et des violences qui ne le concernent pas du tout, mais qu’ils reçoivent… quand même de plein fouet dans leur quotidien.
Nous savons aujourd’hui combien les choix inconscients qui sont à l’œuvre dans le choix du partenaire, dans la formation d’un couple, vont tisser des liens particuliers qui seront nourris par des conduites qui ne correspondent pas toujours aux besoins profonds de l’un ou l’autre.
C’est la psychanalyste Catherine Ben Said qui posait cette question extrêmement pertinente : « Qui j’aime quand j’aime ? », pour nous inviter justement à mieux comprendre l’origine profonde de certaines conduites et comportements répétitifs qui peuvent aliéner, blesser le partenaire que nous aimons, avec qui nous partageons l’essentiel de notre existence.
Le philosophe Louis Althusser, reconnu comme dément, et hospitalisé à Sainte-Anne, ne savait pas encore qu’il étranglerait sa femme Hélène, dans un accès de folie, quand il lui écrivait, vingt ans plus tôt, avec beaucoup de lucidité, cette longue lettre : « Je crois que je t’ai imposé dans les dernières années, et sans doute dès le début ou presque de nos relations, une infinité de brimades. Je t’ai brimée pour ta maladresse, je t’ai brimée pour tes "taches", je t’ai brimée pour ta façon de t’habiller, je t’ai brimée en te coupant la parole devant des tiers et, ce qui est pis, sans que personne ne fût là entre nous, en montrant de l’impatience quand tu parlais, je t’ai brimée pour tes sauces de salade, je t’ai brimée (et c’est sans doute le plus important) en me montrant sceptique à l’égard d’un certain nombre de tes projets (ta capacité à l’endroit de l’italien par exemple), de tes jugements (ce que tu pensais du monde du cinéma, par exemple), voire de tes capacités de transformation. Et je pense que tu as dû éprouver cette accumulation de réserves et de blessures, voire de revanches, qui sans doute n’étaient pas adressées à toi en personne, mais qui t’atteignaient tout de même avec la même précision et la même efficacité que si elle te visaient en personne, avec une amertume profonde, d’autant plus profonde que tu sentais que tu n’étais pas en cause en vérité, mais que cela ne m’empêchait pas de m’acharner sur toi. Amertume et sentiment d’injustice dont je comprends qu’ils aient pu te révolter contre moi et contre la vie que je te faisais mener pour régler sur toi des comptes qui ne te concernaient pas. Je voudrais te dire que je crois que je ne suis plus le même inconscient. Je sais maintenant et fort bien qui ces brimades visaient. Nous savons que c’est ma mère, il n’y a plus le moindre doute là-dessus. »
Nous avons là, outre un témoignage exceptionnel, celui d’un cas extrême, mais qui devrait nous interroger, sur les conséquences profondes liées à des violences subies ou trop longtemps refoulées.
J’aborde ici le point de vue de celui/celle qui décide de quitter, de prendre la décision de s’éloigner, de se séparer d’un être cher qui jusque là était important dans sa vie. Il s’agit d’une épreuve délicate, difficile à vivre, qui va réveiller des contentieux intra et inter-personnels, dont le retentissement va accompagner longtemps, celui ou celle qui prend une telle décision. Je vais appeler le quittant, celui/celle, qui prend la décision, et le quitté, celui/celle, qui subit cette décision.
Il y a tout d’abord, le plus souvent, une anticipation persécutoire, autour des conséquences de cette décision pour le quittant et pour le quitté. Dans leur tête se créent différents scénarios dans lesquels ils imaginent ce qui pourrait se passer chez l’un et chez l’autre, en relation directe avec la décision de partir, avec parfois le poids d’une répression imaginaire toujours à l’affût.
« Ont surgi en moi, tout un flot de pensées dont la source, j’en suis consciente, disait cette femme, est alimentée par une culpabilité endémique qui m’habite depuis longtemps. J’étais tiraillée par des remords, j’imaginais le pire pour lui. Des vagues d’interdits me poussaient à renoncer, à rester, à continuer de subir, à rester dans une relation qui pourtant ne me convenait plus depuis longtemps ».
« Ma décision était prise, irrévocablement, me semblait-il, et chaque matin, en m’éveillant je me disais, c’est aujourd’hui, il faut que je lui dise que ce n’est plus possible, que je pars, et le soir, j’avais tout gardé en moi. J’ai mis deux ans à pouvoir oser. Ce jour là elle m’a dit, je le savais, j’attendais que tu ais le courage de me le dire. Je suis soulagée ».
« Ai-je le droit de le/la quitter ? Nous avons quand même cheminé ensemble durant des années, traversé des épreuves, anticipé des rêves, fait des projets en commun, vécu des moments intenses, côtoyé le bonheur… ».
Le quittant traverse des doutes, éprouve des malaises, construit et déconstruit des arguments, imagine des scénarios. « Je me sens en dette, je lui dois beaucoup de choses, sans elle je n’aurais pas fait, pas rencontré, pas découvert… Peut être qu’elle va déprimer, faire une tentative de suicide, m’enlever les enfants, me démolir auprès de sa famille, de nos amis… ».
Des vagues de nostalgie, rattachées à des souvenirs heureux remontent à la surface. Dans le cas d’un divorce envisagé, il y a le poids des enfants qui pèse fort, qui paralyse ou qui sert d’alibi pour ne pas se quitter. « Je ne peux quand même pas les enlever à leur père, ils ont besoin de nous deux ». « Mes parents ne supporteront pas que je puisse divorcer, cela ne se fait pas dans ma famille ».
Il y a parfois, massivement, la résurgence d’insatisfactions, de frustrations ou le retentissement plus ou moins tenace, incisif, de certaines blessures toujours à vif, de situations inachevées qui restent douloureuses, et, l’un ou l’autre perçoit que la séparation ne donnera pas quitus. Le besoin aussi de témoigner d’une gratitude, d’une reconnaissance pour les découvertes, les cheminements réalisés, le parcours accompli. « Je ne serais pas l’homme, que je suis devenu sans toi, tu m’as fait beaucoup grandir… ».
Associée à la prise de décision de quitter, il y aura une exploration, mâchée et remâchée autour de la mise en œuvre des moyens à prendre pour concrétiser et réaliser ce nouveau choix de vie. Et en premier la façon dont il sera possible d’en parler, de l’annoncer au quitté. Soit directement : « Je vais te quitter, je te quitte, je renonce à poursuivre notre relation, je n’éprouve plus d’amour pour toi, je me sens trop malheureux/se, incompris/e… ».
Soit plus indirectement : « Je ne te sens pas heureux/se avec moi, il y a trop de choses qui ne vont pas bien entre nous, je te sens de moins en moins présent/e, je me demande ce que nous faisons ensemble, nous vivons coté à coté comme deux étrangers… ».
Parfois il y a eu un élément déclencheur qui a provoqué un séisme maltraitant ou brisant même la confiance dans la relation: la découverte d’une relation tierce chez l’autre ou l’amorce d’une relation chez celui/celle qui envisage de ne pas rester écartelé/e entre deux sentiment, deux engagements ou deux relations.
Il est toujours difficile de ne pas entre dans le réactionnel avec des remontée de colère, l’accumulation de non dits des accusations refoulées, des reproche jusqu’alors silencieux envers celui ou celle qui nous a déçu, blessé et meurtri.
Mais il semble encore plus difficile d’ose dire : « Je ne t’aime plus », car cela est en tendu le plus souvent comme un rejet une disqualification, un renvoi au néant Et pourtant, pouvoir dire ses sentiments réels actuels parait nécessaire et indispensable pour chacun des protagonistes. « Nous nous sommes aimés, je t’ai aimé, je me suis senti aimé par toi, mais aujourd’hui, aussi honnête que je puisse être envers moi même, je ne peux appeler amour ce qui m’habite. Je peux avoir de la gratitude, de l’admiration, de la reconnaissance, pour tout ce que tu es, tu as fait, mais ce n’est pas de l’amour ».
Dans cette phase, les réactions de celui/celle qui est quitté sont parfois violentes, avec les manifestations d’un terrorisme relationnel qui voudrait “imposer” à l’autre des sentiments qu’il “devrait avoir”, des culpabilisations autour de ce qu’il/elle a fait pour celui/celle qui nous quitte.
Certains ressortent et vous jettent à la figure ce que j’appelle les livres de comptes affectifs. Carnets, cahiers, feuilles volantes, sur lesquels nous avons noté, page de droite : “tout ce que nous avons fait pour lui/elle” et sur la page de gauche : “tout ce qu’il n’a pas fait et aurait du faire pour nous !”.
Nous avons besoin pour se quitter, surtout si la relation a été chargée de beaucoup d’espérances, nourrie de rêves de vie, de toutes nos énergies. Nous avons besoin de toutes nos ressources, pour affronter la colère, l’agressivité ou le silence culpabilisant, la phase dépressive que nous avons déclenchés, pour se confronter aussi à l’inconnu qui nous attend.
Pour accepter aussi de s’interroger : « Comment en suis-je arrivé là, qu’aurais-je pu faire, ne pas faire… ?» « À quel moment notre relation s’est elle embourbée, s’est elle paralysée, dévitalisée ? ».
Tout ensachant, que notre environnement proche est rarement aidant. Car souvent nos amis, notre famille, nous incitent à rester, à faire un effort, à comprendre l’autre, à essayer de changer quelque chose chez nous, sans entendre toujours que ce que nous vivons est insupportable et parfois n’est plus inacceptable.
Pour retrouver le maximum d’énergie, une étape importante sera d’envisager de “nettoyer la tuyauterie relationnelle” qui nous relie aux relations significatives de notre existence. Nous gardons trop souvent et durant longtemps des messages toxiques déposés, soit par des relations proches, soit par des relations qui ont été importantes pour nous, et, il arrive qu’une séparation réveille ainsi, remette à jour des blessures, des situations inachevées qui entrent en collision avec le vécu actuel.
Beaucoup de nos conduites risquent d’être énergétivores et réactionnelles, alors que nous avons besoin du maximum d’énergie pour affronter l’équivalent d’une mise au monde quand on se sépare d’un être proche, avec qui nous avons cheminé durant des années, construit un univers qui nous a dynamisé ou blessé durant des années. Les retrouvailles, les réconciliations possibles avec notre passé, avec notre histoire, ou plus simplement avec l’homme ou la femme que nous sommes devenus, seront potentiellement énergétigènes, c’est à dire chargées d’énergies en devenir, source d’émotions, de stimulations pour de nouveaux projets, avec la libération de nouvelles ressources.
Il arrive parfois que nous soyons amenés à faire un travail sur soi de clarification, d’élagage, de remise en cause de l’un ou l’autre de nos systèmes relationnels. Des collusions que nous avons entretenues entre nos sentiments et le vécu d’une relation devenue inadéquate à la personne que nous sommes devenue. Quand nous ressentons trop de distorsions entre nos attentes et les réponses apportées, partagées avec l’autre, quand nos valeurs sont bafouées, quand le plaisir d’être est trop blessé, quand notre vivance est en souffrance, nous pouvons, par un travail personnel, nous réconcilier avec le meilleur de nous.
Cela peut signifier qu’avant de nous ouvrir, de nous lier à nouveau, de pouvoir oser d’autres engagements, il peut être nécessaire de faire le tour de soi même, des possibles qui nous habitent, de créer un temps d’écoute envers celui ou celle que nous devenons.
Quitter une relation qui a été importante, aimante, chargée de souvenirs positifs et aussi d’épreuves, d’incompréhensions, de tensions et parfois de violences est toujours une épreuve, qui va nous faire grandir, pour nous permettre de devenir qui nous sommes, aujourd’hui, dans cette période, dans cette étape de vie qui est la notre. Tout ceci avec une ligne de conduite impérative : oser se respecter.
Je considère que le déroulement d’une vie humaine est semblable à une succession de naissances faites de rencontres et de séparations.
C’est ainsi que nous passons l’essentiel de notre existence à nous mettre au monde… et cela jusqu’à la fin de notre vie terrestre.
Le propre du vivant sur cette terre, c’est que tout à un début, (une naissance), une vie (une croissance) et une mort (une finitude ou un passage suivant nos croyances).
Ce qui nous invite à introduire beaucoup de relativité dans nos certitudes ou nos mythologies personnelles concernant les séparations.
Nous aurons donc à côtoyer trois types de séparations :
- celles qui sont nécessaires à notre propre croissance,
- celles qui nous sont imposées,
- et celles que nous choisiront à travers l’évolution et les péripéties de notre existence.
Vivre les séparations nécessaires
- La première des séparations que nous devons affronter, sera une des aventures les plus extraordinaires de notre vie : sortir du ventre, se séparer de sa génitrice, qui va devenir ainsi (dans le meilleur des cas) une maman et une mère.
- Autre séparation nécessaire : prendre le risque de se séparer, (c’est à dire de mieux se différencier) de l’enfant imaginaire qui habitait l’esprit, le cœur et les rêves de nos géniteurs.
- Sortir des désirs et des peurs que nos proches déposent sur nous. Cela suppose de trouver la bonne distance pour ne pas nous laisser envahir par les attentes ou les bonnes intentions de ceux qui prétendent nous aimer.
Vivre les séparations imposées
Il y aura les premières pertes, celles liées à l’éloignement, l’abandon ou la disparition d’un être cher qui, si l’attachement est fort, seront vécues soit comme un rejet, soit comme une trahison par celui qui voit disparaître, mourir, ou s’éloigner celui ou celle à qui il s’était attaché.
Ce sera le cas des grands parents, des amis d’enfance, des premières amours qui peuvent être versatiles !
De plus dans le déroulement de toute existence, vont surgir un certain nombre de crises.
- Celles liées à l’évolution des sentiments (déplacement, disparition, désamour…)
- Celles inhérentes à la vie en couple. Comment passer du “UN” à “TROIS” ; donc sortir de la fusion pour accepter la différenciation : un “JE + JE” et ensuite à la triangulation : l’autre, moi et la relation qui nous relie. Il y aura également des risques de séparations liées à des évènements qui seront vécus par l’un ou l’autre comme une violence qui nous est imposée, sur laquelle nous n’avons aucun pouvoir : trahisons amoureuses.
Parfois l’évolution de l’un, dans une relation proche, peut l’éloigner de nous, lui faire découvrir brutalement qu’il vit avec une personne (nous) qui n’a plus les mêmes valeurs ou engagements, que ses choix de vie sont antipodes des nôtres. Une succession de prises de conscience peuvent l’entraîner à découvrir qu’il a besoin de se respecter, de ne plus se laisser définir ou maltraiter par un conjoint/une conjointe qui est devenu en quelques années un étranger ou une étrangère.
Vivre les séparations choisies
Elles peuvent surgir dans une existence à tout moment, et en particulier à la suite de l’irruption d’évènements imprévisibles ou d’un travail sur soi, d’une maladie, d’un accident. Autant de circonstances qui déclenchent des ouvertures, qui réveillent des énergies, qui vont nous permettre d’accéder à de nouveaux choix de vie.
Déménagement, éloignement, choix d’un nouveau pays, autant de situations qui vont nous éloigner, nous séparer de personnes proches, significatives ou chères et entraîner des changements dans nos relations. Divorce, rupture amoureuse, qui vont laisser parfois laisser des traces douloureuses, réveiller des blessures anciennes, mais qui peuvent mobiliser aussi des ressources inattendues.
Apprendre à se séparer sans se détruire est possible
En particulier en respectant un certain nombre de démarches relationnelles et en clarifiant quelques points essentiels en soi-même.
Mieux distinguer en nous, les sentiments positifs de ceux qui sont négatifs, à l’égard d’une même personne, pour ne pas rester prisonnier d’un amalgame de ressentis et de souffrances qui nous fait tout rejeter de l’autre. Pouvoir témoigner de la qualité de la relation vécue (de tout le bon partagé, comme du pas bon et du toxique, qui ont pu circuler dans les échanges, les partages, les affrontements ou les conflits. Mieux conscientiser l’impact de la séparation sur notre passé et entendre le réveil des blessures archaïques qui peuvent nous envahir lors d’une séparation ou d’une perte. A partir de là, il devient possible de commencer à faire le deuil d’une relation.)
Faire le deuil lié à la perte d’un être cher
Cette expression, fréquemment utilisée par l’entourage de celui qui vit une séparation, est souvent une invitation à ne plus rester dans la tristesse, le chagrin ou le ressentiment qui sont des ressentis qui habitent celui ou celle qui a vécu une perte ou une séparation.
Les conseils les plus fréquents (et pas nécessairement les plus efficaces) sont : « Il faut oublier », « Tu as la vie devant toi », « Il faut laisser faire le temps », « C’est l’avenir qui est important » etc.
Dans ma pratique d’accompagnant, pouvoir faire le deuil, découle d’une démarche très concrète, à partir de modalités accessibles à chacun et autour d’enjeux précis.
La finalité en sera d’accepter de se réconcilier avec soi-même, pour accéder à une nouvelle naissance, à une autre façon d’être.
- Mieux conscientiser que toute perte, toute séparation, fait violence à celui/celle qui l’a subie et que cet évènement, non seulement remet à jour des blessures anciennes, mais va aussi créer (ou réactiver) une blessure narcissique autour de l’image de soi.
- Accepter de s’appuyer sur un outil accessible à chacun : la visualisation. Et, à partir de là, mettre en œuvre une démarche de symbolisation. Ainsi, avec l’aide d’un ou plusieurs objets symboliques, librement choisis par la personne, on pourra :
- Restituer la violence reçue à travers la perte, l’éloignement de l’autre.
- Mieux se représenter la blessure crée ou réveillée par cette violence. Mieux conscientiser la souffrance produite et accepter de percevoir l’apparition de certains symptômes ou somatisations, comme étant des signaux d’alerte nous invitant à prendre soin de nous.
- Pouvoir prendre conscience de “l’auto violence” que nous nous infligeons à partir d’une violence reçue et de la façon dont nous entretenons nos blessures, notre désarroi ou notre détresse en restant dans l’accusation de l’autre ou la dévalorisation de soi.
Cela supposera d’apprendre à reconnaître ce qui se passe en nous, plutôt que de rester centré ou bloqué sur le pourquoi du comportement de l’autre ou d’entretenir une véritable hémorragie énergétique en restant dans l’accusation, le reproche, la mise en cause, la dévalorisation de soi ou de l’autre.
Il faut savoir que pouvoir reconnaître la violence reçue à travers le départ ou la disparition de l’autre et que prendre le risque de la restituer symboliquement, va libérer des énergies, modifier l’image de soi, dynamiser de façon positive notre relation au monde. Que cela nous rend plus disponible pour prendre soin des sentiments qui peuvent rester vivaces et présents en nous, à l’égard de celui ou celle qui nous quitté. Que cela peut entraîner une meilleure clarification de la qualité de la relation qui a été meurtrie, blessée ou coupée, ce qu’il en reste (que je peux garder) ce qui n’a pas été bon (que je peux rendre).
Dans les séparations conjugales et les divorces, il peut être souhaitable de pouvoir reprendre, de se réapproprier le rêve de vie déposé chez l’autre au moment du passage de la rencontre amoureuse à la relation de couple. Ne pas oublier que dans un couple qui se sépare, le divorce est la rupture du lien conjugal et non celle du lien parental. Celui ci doit être maintenu et nourri par chacun des parents, pour éviter que les enfants ne deviennent l’enjeu d’une relation fictive qui s’auto entretient et continuent à alimenter les conflits des ex conjoints.
L’ultime séparation, notre propre mort
La fin de notre cycle de vie, qu’on appelle la mort, constitue l’ultime séparation. Séparation d’avec notre état d’être vivant, d’avec un entourage proche, de projets ou d’engagements.
S’approcher du passage qui nous conduira vers un au-delà, autour duquel, suivant nos croyances, nous allons donner différents sens et visages.
Il me semble que cela peut s’accomplir dans la paix si nous avons pu nous réconcilier avec l’une ou l’autre des situations inachevées de notre histoire.